Les Groupes d’Analyses de Pratiques sont proposés communément dans les métiers sociaux, médicaux et de la relation d’aide, mais peinent encore à s’installer comme un espace indispensable. Pourtant, face aux difficultés grandissantes des différents professionnels dans leur travail (métier, conditions de travail, difficultés des usagers, …), l’implémentation de Groupes d’Analyse des Pratiques peut s’avérer être une solution à bon nombre d’impasses. Mettre en place des Groupes d’Analyse de Pratiques relève de la responsabilité sociale et politique des institutions. En effet, dans les métiers de la relation d’aide, de soins et de l’écoute, les personnes sont confrontées régulièrement à des situations difficiles, tendues, agressives, des comportements énigmatiques, des pathologies psychiques. Toutes ces difficultés nécessitent des élaborations au cas par cas, requérant des réponses à partir de l’expérience et du vécu de chacun et de leur collectif.
À partir de l’expérience singulière individuelle et collective
Le Groupe d’Analyse de Pratiques est une manière de mettre l’expérience professionnelle au cœur d’un travail d’élaboration centré sur le vécu. Dans les différents termes utilisés, il peut être question de supervision, de contrôle pour les métiers de psychologues, de psychanalystes, éducateurs, d’assistants sociaux… Il s’agit de mettre en discours un cas, de l’interroger et d’élaborer en prenant en compte les spécificités du métier et de l’institution. Supervision ou Analyse de pratiques, il s’agit de réfléchir sur les énigmes présentes dans toute pratique professionnelle et les effets du discours sur chaque professionnel et sur le groupe. Le Groupe d’Analyse de Pratiques est un dispositif qui permet de poser les questions, d’effectuer des diagnostics de pratiques professionnelles en situation, repérer le Réel[1] en jeu. Le Groupe d’Analyse de Pratiques part de l’hypothèse que l’expérience enseigne chaque professionnel, à condition qu’elle soit associée à une mise en mot de la pratique professionnelle. En effet, il existe un savoir insu, des points aveugles, des dénis, des opacités.
Apport et posture de l'intervenant
L’intervenant mettra en évidence les discours, les symptômes, ce qui n’est pas dit, les détails imperceptibles, les processus logiques des phénomènes en jeu, tant sur le plan psychique, groupal et institutionnel. L’interrogation clinique et psychosociologique permettra à chacun et au groupe de faire émerger un savoir nouveau sur ses propres pratiques. Le GAP privilégie les interactions entre les processus psychiques et les processus sociaux. L’intervenant apportera les connaissances supplémentaires nécessaires pour une lecture des symptômes et des structures psychiques, à partir des références de la psychanalyse et de la psychosociologie clinique, afin de construire avec le groupe des solutions rendant la pratique professionnelle à la fois confortable et désirante. Une posture bienveillante, toujours éthique, prenant en compte la place de chacun dans le groupe est nécessaire, afin que les participants associent les idées librement, se soutenant du savoir collectif.
Une reconnaissance des pratiques professionnelles
Dans une pratique professionnelle, il existe toujours des difficultés, des énigmes et des impasses. Avoir une lecture plus claire de ses pratiques et de leurs effets sur les autres et le collectif de travail, entraîne un confort certain pour chaque professionnel. Les affects en sont modifiés, le lien social également. Dans certains métiers confrontés au réel de la mort, de la vieillesse, de la maladie psychique, de la violence, l’interrogation de la pratique professionnelle constamment renouvelé permet de maintenir le désir du métier pour lequel chacun s’est engagé. L’échange sur ses pratiques permet également de trouver une reconnaissance, une compréhension des difficultés entre pairs, souvent manquante ailleurs. Le GAP est également une reconnaissance des dimensions subjectives d’une pratiques professionnelle.
Pour prévenir des maux
Quand la charge de travail est élevée, les conditions d’exercice difficiles, un GAP permet de construire des étayages et de soutenir une difficulté collective ou individuelle. Un GAP peut contribuer à limiter les épuisements professionnels en repensant les équilibres et en appréhendant mieux les propres limites de chacun.Un GAP a des effets formatifs incontestables plus importants que les formations classiques. Ces effets formatifs ne sont pas de l’ordre du modèle pour tous, c’est en cela qu’il diffère fondamentalement de la formation. Les apports théorico-cliniques sont centrés sur la parole de chacun et les interrogations du groupe. En répondant à une demande spécifique liée à une situation précise, les connaissances ont une résonance souvent immédiate dans la pratique. De plus, les paroles déposées, éclairées par de nouvelles références permettent d’obtenir une distance par rapport au « collage » existant entre la situation et les professionnels, entre la situation et le groupe, dont les différents affects en sont les symptômes les plus visibles. Les GAP permettent également de mutualiser les différents savoirs d’une équipe ou d’un groupe appartenant à une même fonction. Le groupe décrypte autrement une situation et fait donc émerger de nouvelles solutions. De plus, l’intervenant apporte une lecture des situations et des processus en jeu et évite ainsi les interprétations sauvages, les nominations fixantes. Il permet de décrypter les dynamiques psychiques et psychosociologiques difficiles à interpréter, la place de la plainte et de la souffrance.
[1]Réel est un terme utilisé par Lacan pour décrire l’impasse, ce qui ne peut pas se dire, se définit comme l’impossible, ne peut être complètement symbolisé…